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Maison d’édition indépendante fondée en 1992


Un désir de haïku

Une petite encyclopédie

Pierre Reboul

Le haïku est le plus petit poème conçu pour contenir le monde et l’univers, chacun d’eux est une de ces minuscules boîtes précieuses où gisent des joyaux bruts.

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Collection : Le Prunier
Nombre de pages : 104
Format : 140 x 215
Date de parution : mai 2022
ISBN : 978-2-35432-347-9
14,00€
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Préface de Pierre Crépon
(voir 'Extrait' ci-dessous)

Le haïku est le plus petit poème conçu pour contenir le monde et l’univers,
chacun d’eux est une de ces minuscules boîtes précieuses où gisent des joyaux bruts.

En regroupant et en décrivant les divers éléments qui le constituent – ses règles, son esprit, ses sentiments – cet ouvrage familiarise le lecteur avec la subtilité de cette expression artistique et spirituelle. Il rassemble une trentaine de courts chapitres dont chacun s’attache à décrypter les ressorts de l’écriture des haïkus et nous donne l’envie de composer de tels poèmes.

Parsemée de haïkus de l’auteur et de citations d’auteurs japonais et occidentaux, cette petite encyclopédie n’est ni un traité ni une anthologie, mais une ouverture à cette Voie de la poésie qu’est l’écriture de haïkus.  
Préface de Pierre Crépon

Utagokoro ou l’envie de composer des haïkus

Le cadre : invite ou contrainte ?

La forme
   Le tercet
   La métrique 5 – 7 – 5

La composition en images
   Rôle de la césure (kireji)
   Le nombre d’images
   Les rapports des images entre elles

Le rôle du mot de saison (Kigo)
L’imprégnation japonaise du haïku
Écrit spontané ou travaillé ?
Comment classer les haïkus
La forme picturale du haïku
Le haïga
Le haïbun

L’esprit du haïku
Zen et haïku : le haïku, espace de méditation
Degré d’implication émotionnelle
Les cinq sens et le haïku
Le haïku en groupe
La récitation publique du haïku à voix haute
Sens livré et sens caché
Une écriture à double fond, allusive
Le double sens
Une écriture du moins
Satori
Écrire des haïkus

La palette
Aware
Wabi
Yûgen
Fueki ryûkô
Kietsu
Shasei
Qijin hô
Sabi
Wabi-sabi
Yubi
Fûkyô
Senryû
Jisei


Table des notes
Bibliographie
Préface

L’art de composer des haïkus est une pratique qui partage une unité profonde avec les autres disciplines – artistiques, spirituelles, martiales – d’origine japonaise que l’on désigne par le terme « Voie », en japonais (道). Le Japon a ce génie particulier d’avoir donné une dimension existentielle à des pratiques diverses. On connaît les arts martiaux largement répandus en Occident qui répondent à ce terme  : aikidô (Voie de l’énergie et de l’harmonie), kendô (Voie du sabre), kyudô (Voie de l’arc), etc., que l’on regroupe sous le terme générique Budô. La calligraphie (shodô), l’art floral (kadô), la Voie du thé (chadô) répondent également à cette dénomination de Voie et bien d’autres pratiques culturelles incluent cette dimension particulière même si elles n’en ont pas le nom (le théâtre nô, les différents artisanats, l’art des jardins, etc.).

Le caractère 道 () désigne à la fois le chemin, la route dans son sens le plus prosaïque et ce qu’on appelle en Occident une voie spirituelle, même si le terme « spirituel » n’est peut-être pas tout à fait approprié dans ce cas. se prononce également Tao en chinois, le principe fondamental de toutes choses, terme qui désigne le cœur du taoïsme et qui a été repris dans le bouddhisme pour désigner la Voie bouddhique (Butsudô) et l’éveil. La pratique d’une Voie, , n’est donc pas simplement un passe-temps, elle conduit à un engagement et possède un pouvoir transformateur, « générateur », dit Pierre Reboul à propos du haïku.

La pratique de la poésie est également une Voie, qui se dit kadô en japonais – la prononciation est la même que pour nommer l’art floral mais les caractères sont différents : 花, pour fleur, 歌, pour chant ou poème. Écrire des poèmes, en l’occurrence ici des haïkus – mais ce pourrait être des waka, une autre forme, antérieure, de poèmes japonais qui suivent également des critères précis –, suppose d’intégrer un certain nombre de principes que l’on retrouve dans d’autres Voies.
C’est, entre autres, le fait de respecter des règles formelles précises : par exemple le tercet de cinq, sept, cinq syllabes et les autres règles du haïku peuvent être mis en parallèle avec les katas (mouvements codifiés) des arts martiaux, ou la succession des traits du pinceau dans la calligraphie, le cérémonial du thé, ou la posture précise de la méditation zen (zazen). La pratique d’une Voie consiste en premier lieu à assimiler ces formes précises. C’est dans le cadre de celles-ci que s’expriment la créativité et la liberté, quitte à s’en affranchir partiellement par la suite.

Il s’agit aussi de s’inspirer des œuvres anciennes, et l’on pense aux anthologies de poèmes qui ont jalonné toute l’histoire de la poésie japonaise. Il s’agit également d’aller à l’essentiel mais aussi de laisser s’exprimer ses émotions les plus subtiles ; deux domaines où le haïku excelle. On retrouve ici les influences de deux traditions majeures de l’Archipel : le bouddhisme zen et son dépouillement, le shintô et sa connivence émotionnelle avec la nature.

Quant au pouvoir transformateur de la composition de haïku, citons ces mots de Natsume Soseki dans Oreiller d’herbes : « Les dix-sept syllabes constituent la structure poétique la plus commode à maîtriser : on peut l’appliquer aisément en se lavant le visage, en allant aux toilettes, en prenant le train. (…) Supposons que l’on soit en colère : la colère prend aussitôt la forme de dix-sept syllabes. Sa transmutation en dix-sept syllabes en fait la colère d’un autre. Une même personne ne peut pas en même temps se mettre en colère et composer un haïku. On verse des larmes. On métamorphose ces larmes en dix-sept syllabes. On en ressent un bonheur immédiat. Une fois réduites en dix-sept syllabes, les larmes de douleur vous ont déjà quitté et l’on se réjouit de savoir qu’on a été capable de pleurer. »

Qui dit Voie, dit initiation, apprentissage, transmission. C’est ce que propose ici avec simplicité et évidence Pierre Reboul, haïkiste convaincu et convaincant, dans cet ouvrage précieux qui rassemble les divers éléments indispensables à la composition des haïkus. Bien qu’à l’origine intimement liés à la langue et à la sensibilité japonaises – au point que certains auteurs japonais anciens ont pu estimer que les Occidentaux ne pouvaient pas les comprendre –, les haïkus se sont acclimatés à l’Occident et font maintenant partie intégrante de son expression poétique. Pour qui s’engage dans la Voie du haïku et son pouvoir transformateur, ce livre deviendra un fidèle compagnon à lire et à relire.

Pierre Crépon